Le 23 janvier 2019, Thomas Parisot et moi proposions à Dinan un atelier « Numérique et Economie Sociale et Solidaire (ESS) », tout à fait expérimental. Le but ? Avoir un rapide aperçu des besoins des acteurs de l’ESS sur mon nouveau territoire. Retour sur le déroulement de cet atelier et ce qui en est sorti.

Pourquoi cet atelier ?

Pourquoi proposer cet atelier Numérique et ESS ?

Il y a les raisons circonstancielles :

  • le passage de Thomas dans mes contrées mi-janvier était un formidable prétexte pour me botter le train et pour « faire quelque chose ensemble ». On avait déjà expérimenté l’intervention à 2 voix lors de conférences, alors pourquoi pas cette fois proposer un atelier hors événement pour un écosystème local ?
  • Concernant les écosystèmes locaux…. Les résultats préliminaires de 4 mois d’investigation m’amènent à penser que l’écosystème « tech » dinanais est… soit inexistant, soit invisible. En revanche, un écosystème Economie Sociale et Solidaire (ESS) est assez vivace. Il se rassemble et se croise notamment autour de la rue du Petit Pré, lieu qui regroupe 3 structures moteurs et que j’ai déjà commencé à fréquenter. Comme cet écosystème existe et qu’il m’est sympathique, ce sera cette écosystème-là avec lequel nous échangerons.

Tout ça tombe plutôt bien, vu que j’ai pour ambition (notamment avec l’assembleuse) de soutenir par mes savoir-faire numériques les initiatives du champs de l’ESS en Bretagne. Alors avec tout ça, je me prends à imaginer un cycle d’ateliers Numérique et ESS au long cours, pour épauler les structures locales. Mais pour savoir comment les épauler, faudrait déjà avoir identifié de quoi elles ont besoins…

Le mieux alors serait peut-être que ce premier atelier avec Thomas serve aussi à recueillir quelques bases de diagnostic ?

Et c’est ainsi que l’atelier Expérimenter l’agilité - le début d’un cycle «  Numérique et ESS  » vit le jour.

Pourquoi « Expérimenter l’agilité » ? Je n’avais pas envie d’une simple « enquête » où les gens de l’ESS nous serve de matière première sans contrepartie. J’avais envie d’un vrai mélange des mondes, que chacun reparte avec quelque chose de l’autre monde :

  • Nous : une première compréhension des préoccupations et points de blocage en matière de numérique des professionnels de l’ESS locaux.
  • Les participant·es : un aperçu de quelques méthodologies chouettes héritées d’un mix impur d’éducation populaire et de méthodes agiles, qu’ils puissent éventuellement réexploiter par la suite.

Le déroulement

Pour concevoir l’atelier, nous sommes parties d’une page blanche. Notre intention était dans un premier temps d’ouvrir aussi large que possible la thématique, en se basant sur l’expérience concrète des participant·es pour obtenir un périmètre vaste de problématiques liées au numérique. Puis de rassembler, prioriser, réduire, pour aboutir autant que possible à une liste de sujets « actionnables » dans le cadre d’un cycle d’ateliers ultérieurs.

Une sorte de programme faisant se succéder divergence puis convergence, somme toute assez classique.

Déroulé de l'atelier sur tableau blanc

Dans le détail, ça donne :

1/ Je suis plutôt numérique ou ESS ? : cartographie dans l’espace, sur deux axes, pour donner à voir le profil des participant·es.

  • 1er axe : je me définis comme appartenant plutôt à l’univers de l’ESS ou à celui du numérique ?
  • 2e axe : je suis plutôt à l’aise ou plutôt mal à l’aise avec le numérique ?

2/ Je souhaite repartir avec quoi ? : tour de table avec bâton de parole pour recueillir les attentes des participant·es.

3/ Qu’est-ce que je crains dans le numérique ? : session d’écoute active en duo, autour des crainte liées au numérique au sens large, dans la vie professionnelle ou personnelle. Pendant 2 minutes, l’un des membres du duo réponds à la question posée librement, il peut exprimer tout ce qui lui passe par la tête. Son interlocuteur n’a pas le droit de l’interrompre, de réagir, de poser des questions. Au bout de 2 minutes, les rôles sont inversés.

4/ Qu’est-ce qui me bloque / freine le plus avec le numérique, dans mon projet ? : chacun écrit sur autant de post-its que nécessaire les points de blocage liés au numérique qu’il rencontre dans son cadre professionnel.

5/ pause ! : les participant·es prennent le temps de se dégourdir les pattes, de s’adonner à leurs addictions et de boire un coup ; les intervenants font le point et ajustent la suite du programme.

6/ Je veux… pour… : on s’essaye à reformuler les points de blocage sous forme de User stories simplifiées, pour les transformer en leviers actionnables.

7/ On priorise les actions : parmi toutes les user stories et les problématiques auxquelles elles se rattachent, les participant·es donnent des points à celles qu’ils et elles jugent prioritaires à traiter lors d’un cycle d’ateliers ultérieur. Mais en fait, cette étape sera sautée (explication + bas)/

8/ Clôture : dernier tour de table, avec quoi je repars ?

Ce qui a bien marché

Six personnes étaient présentes en plus des deux animateurices. Ce nombre a été suffisant pour avoir différents types de profils entre numérique et ESS, et pour que des problématiques et besoins variés émergent. Six personnes, ça permet déjà de faire émerger une belle diversité d’attentes !

L’échange avec des personnes qui ne soient pas de leur structure professionnelle a été apprécié.

Certains dirent être venus par pure curiosité, et se sont rendus compte au cours de la soirée qu’ils avaient en fait plein de questions.

On a aussi eu de bons retours sur l’écoute active et l’avancée progressive en entonoir de la soirée.

Et on a même réussi honorablement à gérer les participants les plus bavards et/ou les plus hors sujet !

Ce qui a moins bien marché

La clôture a permis de révéler que fondamentalement… personne n’avait vraiment compris la description de l’atelier :) Malgré tout, ils et elles sont venu·es, intrigués et confiants, et nous disent repartir contents de leur soirée. Merci ! Et la prochaine fois, je trouverai un moyen de vérifier auprès de quelques uns de mes interlocuteurs du sérail que ce que j’écris est vraiment compréhensible…

En même temps, je pense rétrospectivement que nous avons été trop gourmands, que nous avons voulu faire trop en un temps limité. Nous avons peut-être introduit trop de concepts et d’outils disparates qui méritaient à eux seuls un vrai temps d’appropriation. La logique des user stories par exemple n’est pas évidente à saisir en 1/2 heure pour des personnes qui ne sont pas déjà un peu baignés d’agilité… Pas étonnant que le descriptif de l’atelier ait paru flou.

Un semi regret : nous, organisateurs, repartons avec une vision assez précise des besoins génériques qui émergent de chacun des besoins particuliers. Unetelle nous explique avoir du mal à gérer la multitude de mails, et notamment de spams ; rapidement Thomas et moi classons ce point à aborder lors d’un atelier « Hygiène numérique ».

Mais cet exercice de généralisation est trop abstrait pour des personnes qui ne bossent pas dans l’accompagnement numérique. C’est la raison pour laquelle, après discussion avec les participant·es nous avons fait une croix sur l’étape de priorisation.

Alors, ce diagnostic ?

Mis bout à bout, entre ce qui est ressorti des posts-its, des users stories et des échanges spontanées, plein de problématiques diverses ont été touchées du doigt.

L’ensemble dessine déjà une base de sujets qui pourraient être abordés. Ci-dessous, tentative de regroupement en patates thématiques des points de friction relevés pendant l’atelier.

Méthodes et outils de la coopération :

  • « la diffusion de l’information en interne dans ma structure est compliquée »
  • « je cherche de bons outils de travail collaboratif alternatifs, qui ne soient pas du google ou microsoft ou ce genre de chose »
  • « ce qui me préoccupe, c’est la non-appropriation des outils par tous les membres d’une équipe projet »
  • « point bloquant : réussir la mise en place de nouveaux outils (peur du changement lié à la confiance en l’autre et à un besoin de montée en compétence) »

A la recherche d’outils numériques responsables :

  • « je cherche des outils éthiques et fonctionnels / solides - alternatives aux grands méchants »
  • « je cherche un réseau social éthique »
  • « je cherche des outils/logiciels libres efficaces »
  • « difficulté d’appropriation des outils libres »

Communication numérique :

  • « comment bien diffuser de l’information auprès des usagers »
  • « j’aimerais un moyen de communication efficace/sympa/léger/libre qui demande pas trop d’espace serveur »

Hygiène numérique :

  • « gérer / organiser les spams dans une boîte mail »
  • « la gestion du temps et la dimension chronophage du numérique »

Créer son centre de ressource :

  • « rendre visible les ressources ESS dispo à ESSPrance »
  • « organisation de l’information / centre de ressource »

Les outils métiers spécifiques :

  • « solutions pour créer un site internet soi-même ? »
  • « créer son site web et être autonome »
  • « créer un site avec une carte interactive pour centraliser l’info culturelle, associative, etc. Avec possibilité que les visiteur puissent participer à son actualisation. »
  • « comment mettre en place un outil ou logiciel qui permet vraiment de prendre parti et exprimer ses choix ? »

La suite ?

La suite s’organise déjà autour d’un programme d’actions monté à plusieurs pour accompagner les structures du territoire sur le numérique. On y bosse dans les prochains temps et on en reparlera probablement plus tard !

Si tu es pratiquant·e (en amateur ou en professionnel) ou sympathisant·e du numérique, de la fabrication, de l’accompagnement professionnel, avec une sensibilité assumée pour les projets responsables et solidaires et que tu n’es pas loin de Dinan : tu peux dès maintenant réserver ton jeudi 16 mai 2019 pour discuter de tout ceci autour d’un apéro à Dinan !